Réponse à la lettre ouverte de l’inspecteur de l’Enseignement à la retraite, Monsieur Abdoulaye SALL.

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Par/Moustapha DEME, professeur d’arabe au lycée de Djinaky

Cet activiste, ancien inspecteur de l’Enseignement a des connaissances assez incomplètes de l’histoire de l’enseignement arabe au Sénégal. Ce manque de culture est manifeste dans les arguments avancés dans sa lettre ouverte si courte, mais truffée pourtant de légèretés.
Il se dit « profondément préoccupé » pour la création annoncée par Son Excellence, président de la République d’une Direction des affaires religieuses et de l’insertion des diplômés de l’Enseignement arabe au sein de la Présidence.
À l’entame de son argumentaire, l’inspecteur émérite a exprimé son étonnement face à cette démarche présidentielle parce qu’il s’agirait selon lui, de la préférence d’une confession particulière au détriment des autres. L’inspecteur semble entendre par « affaires religieuses » une religion bien spécifique. On se demande comment il a pu connaitre tous les tenants et les aboutissants de cette annonce pour en tirer cette conclusion si hâtive ? le qualificatif « religieuses » devrait suffire de tout commentaire. Au moins que l’on admet l’Islam comme la seule et unique religion au Sénégal. Ce qui ne devrait être le cas pour l’inspecteur.
La façon dont le Monsieur parle de la laïcité renseigne beaucoup sur sa compréhension simpliste de cette notion. Pour lui, la création de cette Direction violerait le principe d’égalité qu’exige un Etat laïc. Un raisonnement qui semble être contradictoire avec la liberté religieuse inscrite dans notre Constitution. Mieux encore, l’enseignement religieux introduit par le régime d’Abdoulaye WADE dans le système éducatif constituerait-il une violation du caractère laïc de notre République ? Cette notion de laïcité est comprise surtout comme une bonne entente entre l’Etat sénégalais et les Religions.
L’inspecteur peut-il ignorer l’existence du Bureau d’Assistance aux Daaras et aux diplômés de l’enseignement arabe (BADEA) rattaché à la présidence sous l’ère Macky SALL ?
Au Conseil des ministres du 30 novembre 2022, le président SALL parlait déjà d’un Programme d’Appui aux Daaras et aux Diplômés de l’Enseignement Arabe (PADEA). Comment un inspecteur de l’enseignement est censé ignorer toutes ces mesures de l’ancien régime ? qu’est-ce qui motivait son mutisme d’alors ? pourquoi sa lettre n’inclut pas ces mesures antérieures ?
La création du baccalauréat arabo-islamique par le président Macky SALL peut-elle aussi être considérée comme rupture d’équité vis-à-vis des autres disciplines linguistiques ?
En outre, la confession du futur directeur de cette nouvelle Direction semble préoccuper l’inspecteur. Selon son raisonnement, cette nomination « pourra affecter l’équilibre et la cohésion entre les différentes communautés religieuses du Sénégal ».
Comment la nomination d’un sénégalais quelles que soient ses convictions religieuses saperait les fondements solides de notre vivre-ensemble ?
L’inspecteur semble ignorer que l’actuel ministre de l’intérieur est de confession chrétienne et c’est lui qui s’occupe pourtant du culte dans ce pays. Sa nomination affecterait-il l’équilibre et la cohésion ? avant lui, ce fut Jean Collin de même confession qui occupa ce poste ministériel. Plus de cinquante ans après, est-ce qu’on peut dire avec des faits historiques vérifiés et vérifiables que le passage de Collin à la tête du ministère de l’intérieur a éprouvé durablement le vivre-ensemble entre les différentes communautés religieuses au Sénégal ?
La confession de la personne en charge du Ministère de l’Education Nationale (MEN), un ministère qui a la mission d’instruire et d’éduquer tous les sénégalais poserait-elle aussi un problème sérieux de l’équilibre et la cohésion ?
Le président de la République, président de tous les sénégalais affecterait-il la cohésion nationale de par sa confession ?
L’inspecteur de l’enseignement à la retraite s’est sans nul doute bien imprégné dans les questions de l’éducation et de la formation qui relèvent surtout de son domaine de compétence. Un inspecteur de cet acabit ne peut pas ignorer que la langue arabe est utilisée comme medium d’instruction dans beaucoup d’écoles au Sénégal. Ce qui n’est pas le cas pour les autres disciplines linguistiques. L’inspecteur a-t-il vu une seule école ici au Sénégal où le russe, l’allemand ou l’espagnole est utilisé comme langue d’enseignement ?
Faire une comparaison entre l’arabe et les autres langues pour en déduire une quelconque rupture d’égalité des chances relèverait de la mauvaise foi de la part d’un homme de l’art.
Le problème d’équité se pose justement si les diplômés en arabe ne peuvent être insérés dans le marché de l’emploi à l’instar de leurs camarades littéraires des autres disciplines linguistiques. Seuls les titulaires des diplômes en arabe ont ce problème d’insertion. Par conséquent, trouver des moyens leur permettant de travailler comme tout bon citoyen n’est que justice.
Récemment, une Direction des Daaras a été créée au sein du Ministère de l’Education nationale. Qui parle de Daara (école d’enseignement coranique) parle de l’Islam. La création de cette Direction violerait-elle aussi le caractère laïc de la République ?
Le Sénégal depuis son indépendance accorde toujours une place importante à l’enseignement arabe. La méconnaissance de l’histoire de l’enseignement arabe au Sénégal justifie beaucoup d’impertinences dans cette lettre.
L’activisme certes très utile pour la veille citoyenne semble prendre le dessus sur tant d’années d’expériences dans les hautes responsabilités éducatives du pays. C’est la seule raison qui explique ce raisonnement digne d’un profane pour les questions qui touchent en partie l’Education nationale.
Pour finir, nous invitons humblement notre émérite inspecteur à revoir sa copie (sa lettre).

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